(Article) Histoire de la fête des crus du Beaujolais

Publié le par Stéphane Guillard

(Article) Histoire de la fête des crus du Beaujolais

La fête des crus dans le temps

Depuis 1981, pour fêter le printemps, le Beaujolais, son vignoble et ses crus sont en ébullition pour la désormais traditionnelle « fête des crus du Beaujolais ». Depuis cette date, chaque année, une des dix appellations accueille les festivités. Si la majorité des appellations viticoles du Beaujolais recouvrent chacune une commune en particulier, il en est certaines qui s'étendent sur plusieurs localités. Par exemple, les appellations « Brouilly » ou « Côte de Brouilly » sont disséminées sur plusieurs communes, donnant l'occasion à différents villages d'être, le temps d'un week-end, le cœur et l'âme du Beaujolais viticole.

La fête des crus du Beaujolais est l'occasion pour des milliers de visiteurs venus de toutes parts de déguster un panel très large de crus de la région. Si au début l'évènement était relativement confidentiel, le succès n'a cessé de grandir et la manifestation a continué d'affirmer son identité. Depuis plusieurs d'années, l'évènement est devenu tellement important qu'il s'est mis à accueillir des dizaines de milliers de visiteurs. Pour satisfaire tout le monde et pour favoriser l'essor de la manifestation, il a été décidé d'organiser les dégustations sur un week-end complet au lieu de la seule journée du dimanche auparavant.

Les viticulteurs et les instances viticoles, heureux d'un tel succès, ont vu à travers la fête des crus du Beaujolais l'occasion de promouvoir leur région et leurs vins. Afin d'assurer la pérennité et la renommée de la fête, des animations en tous genres ont vu le jour au fur et à mesure du temps. Si le traditionnel concours « Victor Pulliat », du nom du sauveur du vignoble et originaire de Chiroubles, continue de récompenser les meilleurs vins des crus du Beaujolais, des dégustations de vieux millésimes, des défilés de fanfares, des concerts, des ventes aux enchères de crus du Beaujolais ou encore des bals folkloriques sont venus renforcer le côté festif de l'évènement.

Depuis quelques éditions, la fête des crus possède une thématique précise permettant d'ancrer la fête dans les mémoires et dans un certain folklore. Les rues sont décorées en conséquence, les bénévoles déguisés et les groupes de musique rappellent le thème choisi. Les milliers d'amateurs de vin dansent et virevoltent de stands de dégustation en stands de dégustation au son et aux couleurs des thématiques. Comme chaque année, lors du dernier week-end d'avril, le Beaujolais s'apprête à accueillir quelques 30 000 visiteurs et dégustateurs de vins. Si la fête est placée principalement sous le signe de la viticulture, on n'en oublie pas pour autant la promotion de la région dans son ensemble.

Les vins sont servis aux visiteurs par les viticulteurs eux-mêmes, ce qui favorise l'échange, la discussion et la connaissance des vignobles. Cette volonté de faire de la fête des crus du Beaujolais un événement de proximité, de tradition et d'affirmation du terroir local se retrouve dans la présence des nombreux artisans régionaux et de producteurs agricoles locaux. Évidemment, le gamay, unique cépage des vins rouges du Beaujolais, est au centre de toutes les attentions mais chacun reconnaît que déguster un fromage local fait encore mieux apprécier le fruit, la légèreté et l'arôme des crus du Beaujolais.

Romanèche-Thorins, le Moulin-à-Vent et leurs histoires

En cette année 2014, le cru « Moulin-à-Vent » est mis à l'honneur. Faisant certainement partie des crus les plus connus et les plus réputés du Beaujolais, ce cru a la particularité d'être présent sur le territoire de la commune de Chénas, dans le Rhône, et de la commune de Romanèche-Thorins, en Saône-et-Loire. Il est le symbole parfait de l'alliance et de la familiarité historique entre les vins du Beaujolais et ceux de Bourgogne. Le cru tire son nom d'un vieux moulin à vent situé au nord ouest de la commune de Romanèche-Thorins et surplombant la majorité des vignobles de l'appellation. La commune de Romanèche-Thorins elle-même tire une partie de son nom d'un des hameaux les plus célèbres de la localité : les Thorins. Ce hameau, dit-on, produisait aux XVIIIème et XIXème siècles les vins les plus fins et les plus renommés de la région. Pour promouvoir la commune et les vins locaux, on décida d'accoler à l'ancien nom « Romanèche », le nom du plus célèbre hameau de la commune. En 1872, un décret du gouvernement d'Alphonse Thiers autorisa la commune a changé de nom pour permettre aux vins de Romanèche de jouir de la célébrité de ceux des « Thorins ».

La célébrité et la reconnaissance de la qualité des vins des Thorins et du Moulin-à-Vent remonteraient à l'époque de Louis XIV. On raconte qu'au XVIIème siècle, un viticulteur du nom de Claudius Brosse serait parti en direction de la capitale avec son char tiré par des bœufs et une cargaison de vins des Thorins. Après un long voyage de 33 jours, l'homme se rendit à Versailles où il eut l'honneur de rencontrer et d'attirer l'attention du roi soleil, Louis XIV. Ce dernier aurait particulièrement apprécié les vins des Thorins et aurait finalement agréé de la qualité de ces derniers. L'incroyable aventure et la reconnaissance des vignobles proches du vieux moulin à vent des Thorins pouvaient commencer.

Toutefois, l'histoire de Romanèche et de ses vignobles est bien plus ancienne. A l'époque romaine, « Romana-Esca » de son nom latin, était une station de relais. Particulièrement intéressés par la situation géographique et l'exposition des coteaux de la région, les Romains furent les premiers à y cultiver la vigne et à y produire des vins de qualité. La culture de la vigne se développa au fur et à mesure des siècles jusqu'à ce qu'en 1757, le jus de raisin fermenté produit par les vignobles aux alentours du moulin à vent des Thorins prit officieusement le nom de « Moulin-à-Vent ». Depuis cette date, et grâce à l'approbation royale de Louis XIV, les vins des Thorins et de « Moulin-à-Vent » sont parmi les plus réputés du Beaujolais à travers le monde. Le 17 avril 1924 l'appellation « Moulin-à-Vent » est officiellement créée et devient le premier des crus du Beaujolais.

Connue pour ces grands vins, la commune de Romanèche-Thorins est également célèbre pour avoir été la patrie d'un illustre sauveur du vignoble. Cet homme originaire de Roanne s'appelle Benoît Raclet. Issu de la petite noblesse et ancien greffier du tribunal de Roanne, Benoît Raclet s'est installé à Romanèche au cours du premier quart du XIXème siècle, suite à son mariage avec la fille d'un grand propriétaire foncier local et suite à son éviction du tribunal de Roanne après la chute de Napoléon Ier. Rapidement intéressé par la viticulture, Benoît Raclet entreprend également l'exploitation du sous-sol de la commune riche en manganèse. Mais sa célébrité, Benoît Raclet la doit à son action en faveur de la viticulture locale. En proie à de terribles attaques de pyrale, papillon dévorant les vignobles, le Beaujolais est ravagé et la vigne commence à disparaître. Benoît Raclet met alors au point une méthode simple, peu coûteuse mais redoutablement efficace d'échaudage de la vigne pour éradiquer le fléau. L'homme ayant constaté par le plus grand des hasards que l'eau bouillante sauvegardait la vigueur d'une treille de sa propriété, il développe un procédé pour traiter les milliers d'hectares de vignes du Beaujolais. D'abord vu comme un sorcier, Benoît Raclet sera reconnu, peu avant sa mort, par les instances et par ses pairs.

Pour plonger au coeur de cette histoire et vivre un week-end festif sous les rayons de soleil du Beaujolais ou à l'ombre du moulin à vent, venez donc déguster, les 26 et 27 avril 2014, un verre de Moulin-à-Vent au cœur du hameau des Thorins. Vous voyagerez au cœur de l'histoire et des paysages envoutants de ces coteaux.

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